Les Hayet comptent quatre générations de laboureurs, très attachés à leur terre. Contrairement à la croyance populaire, ces hommes sont aisés. Ils possèdent une paire de bœufs ou de chevaux de trait, un attelage et une araire ou une charrue. Leur condition sociale leur réserve des postes à responsabilité dans la hiérarchie des villages. Tel est le cas de Bernard Hayet jurat de Hastingues en 1766.

Durant les 16e et 17e siècles, ces hommes et leurs familles changent rarement de ferme. La carte ci-dessous montre des hastingots rivés à leur terre durant plus de 200 ans. Plus tard, la bougeotte les envahit et le rythme de migration s’accélère; 38 ans pour aller de Peyrehorade à Hittète, 56 ans pour rejoindre Jouandic, 38 ans pour investir Bonnesort et 31 ans pour s’établir définitivement à Tournefeuille.

La première trace d’un Hayet à Hastingues date du 26/12/1597, jour de naissance de Jean. Malheureusement le nom de sa maison natale ne figure sur aucun acte. De son père Bertrand et de sa mère Estebenote DAULOUX, on a aucune information de date ni de lieu car les archives de Hastingues débutent en 1594. Mais il y a fort à parier qu’ils ne devaient pas être bien loin de là. On peut raisonnablement estimer leur naissance autour de 1567.

Ponchon est la seule maison de Hastingues dont on est certain qu’elle fut occupée par les Hayet. La maison, aujourd’hui encore debout, est datée de 1670. Jean Hayet, époux de Marie Dupouy, y nait en 1672. Ils auront deux fils Bernard et Pierre qui élevèront 19 enfants à eux deux. J’imagine les deux couvées s’égayant dans la cour de la maison. Quel travail pour les mamans!

La première migration intervient en 1772. Pierre Hayet et Cécile Vergès prennent la route pour s’installer dans une maison non identifiée à Peyrehorade. Ils s’y marient et y décèderont. Leur fils Pierre épouse Marguerite Dupouy en 1805. Leur petit-fils Pierre(encore un Pierre!) naît en 1810 à Orthevielle, dans la maison Hittète.

Hittète est située au nord de la commune d’Orthevielle. Une deuxième génération va cultiver les terres du Vic de Nots. Jean Hayet, mon arrière-grand-père, épouse Gracie Pascouau en 1866. Cet evènement sonne le retour à Peyrehorade dans la maison Jouandic.

Jouandic, située dans l’ancien quartier d’Igaas, est une grande ferme que la famille quitte en 1904 pour un saut de puce à Orthevielle maison Bonnesort. Aujourd’hui, la ferme est devenue une belle maison d’habitation magnifiquement restaurée.

Cette maison, aujourd’hui livrée aux ronces et aux bambous, est idéalement placée au bord de la grande route Peyrehorade-Bayonne. Tellement bien située qu’elle deviendra bien plus tard une auberge. C’est de là que mes grands-parents vont traverser la RN117 pour aller cultiver les terres de l’Arribère toute proche. En effet, mon grand-père Eugène  est le métayer de Pierre Cyprien Louis DARROZE, magistrat, président du Tribunal Civil de 1ère Instance de Toulouse, Nîmes puis Bayonne et Dax. Né le 8/6/1889 à Orthevielle, il est le fils de Raymond DARROZE, commis principal des contributions indirectes. Entre le propriétaire et son métayer, point de cadeau, c’est 50/50. Ma tante Marie-Louise nous a rapporté qu’avec Mr Darroze  » les haricots sont comptés presque à l’unité près« .

En 1920 la révolte gronde, notamment dans le canton de Peyrehorade, les métayers se syndiquent et organisent des grèves [1]. A l’issue de ces combats, des métayers deviennent propriétaires. Eugène est de ceux-là. Il participe à la création du Crédit Agricole Mutuel de Peyrehorade.

En 1935 il fait construire la maison Tournefeuille à Orthevielle.

En 1943 mon père quitte son engagement militaire pour adopter le nouveau métier de maraîcher. Il rejoint son père à Tournefeuille. Deux ans plus tard, je nais au premier étage parmi carottes et poireaux. En plus des surfaces de cultures légumières, fruitières et florales, mes parents possèdent deux rangées de carolins dans les barthes ainsi qu’un lopin de terre au bord du chemin de sable en lisière de forêt. Sur ce petit rectangle de terre des haricots blancs grimpent le long des « jambes » de maïs. Des tapis de fraisiers sauvages jonchent le barradeau entourant le champ. Nous enfilons des fraises, ma sœur et moi, sur une tige d’herbe fine afin d’en ramener quelques-unes à la maison.
Ainsi se termine l’évocation de la vie de nos ancêtres de la branche paternelle sur une note parfumée et goûteuse.

Source : [1] La révolte des métayers du Bas-Adour dans les années vingt par Hélène Bahus-Lescourret.

Recherches historiques : Claude MINVIELLE.

Crédit photos : Daniel MINVIELLE.

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